Du Gymnote au Coelacanthe
Exposé traitant des sujets suivants :
- DiffĂ©rents Ă©tats dâun navire de guerre, de la construction, au service actif, et retrait
- GenÚse du sous-marin nucléaire français
- Programme Coelacanthe
Les diffĂ©rents Ă©tats dâun navire de la Marine Nationale
La vie dâun navire de guerre est marquĂ©e par une multitude dâĂ©tapes rĂ©glementaires, administratives et industrielles. Ce processus est caractĂ©risĂ© par son statut et son emploi.
Sâagissant dâun bateau il est assujetti, pour parti aux rĂšglements nationaux et internationaux de la navigation en mer.
Un navire de guerre est aussi un matĂ©riel dâarmement. Les Ă©tapes de sa carriĂšre, qui vont de l'expression du besoin au retrait du service, sont encadrĂ©es par une instruction gĂ©nĂ©rale.
Le navire de guerre se distingue de la plupart des matĂ©riels terrestres ou aĂ©riens par lâabsence de prototype, le premier de la sĂ©rie joue ce rĂŽle. Les durĂ©es significatives de rĂ©alisation et dâarmement, des sĂ©ries sont Ă©talĂ©es dans le temps. Il devra disposer d'un Ă©quipage pendant l'armement et les essais.
Les Acteurs
Etat-Major des Armées : EMA
Acteur principal devant définir le format des armées, de leur cohérence et de programmation.
Ayant la charge des opĂ©rations dâarmement naval, il dĂ©lĂšgue gĂ©nĂ©ralement cette tĂąche Ă lâĂ©tat-major de la marine (EMM).
Etat-Major de la Marine : EMM
est en charge de la dĂ©finition du besoin capacitaire, afin de correspondre aux nĂ©cessitĂ© des opĂ©rations dâarmements navals.
Direction gĂ©nĂ©rale de lâarmement : DGA
La DGA a pour mission d'Ă©quiper les forces armĂ©es. En tant que maĂźtre dâouvrage, elle est responsable de la conception, de lâacquisition et de lâĂ©valuation des systĂšmes navals qui Ă©quipent la marine.
Commission permanente des programmes et des essais : CPPE
Une commission indĂ©pendante, dĂ©signĂ©e dĂšs 1938 comme « commission permanente dâessais » a pour nom aujourdâhui la commission permanente des programmes et des essais (CPPE).
Cette commission contrÎle la conformité techniques et la correspondance au besoin militaire.
De la rĂ©flexion Ă lâĂ©laboration du projet
Lâinstruction gĂ©nĂ©rale relative aux opĂ©rations dâarmement
dĂ©taille les actions liĂ©es aux divers stades dâavancement de lâopĂ©ration, de lâinitialisation jusquâau retrait du service. Ce processus doit ĂȘtre adaptĂ© Ă chaque type de bĂątiment, en fonction de ses caractĂ©ristiques, de son mode de construction, de son emploi, voire de sa destinĂ©e en fin de vie.
EMM sâappuie sur un officier de cohĂ©rence opĂ©rationnelle (OCEM) pour rĂ©diger un objectif dâĂ©tat-major (OEM), document de premiĂšre analyse qui permet de dĂ©finir le besoin fonctionnel.
Une dĂ©lĂ©gation gĂ©nĂ©rale de lâarmement Ă©tablit un coĂ»t prĂ©visionnel, et propose une stratĂ©gie contractuelle.
Des chargés de programme (DGA et EMM) définissent une spécification technique de besoin.
Enfin une Notification de MarchĂ© Public et contractĂ© avec lâIndustrie.
Projet et Mise en Construction, du premier sous-marin à propulsion nucléaire français
LâidĂ©e avait Ă©tĂ© lancĂ©e en 1954, Pierre MendĂšs France y avait adhĂ©rĂ© lors dâun conseil interministĂ©riel quâil nous fallait lâarme nuclĂ©aire. A cette Ă©poque il ne sâagissait pas encore de dissuasion mais dâadapter dans un premier temps un sous-marin Ă la propulsion nuclĂ©aire. Les hauts responsables de la DĂ©fense Ă©taient divisĂ©s, les patrons des armĂ©es de lâAir et de Terre ne cachaient pas leur hostilitĂ© au principe tandis quâau Conseil SupĂ©rieur de la Marine lâamiral Lemonnier bataillait avec les amiraux Barjot et Ortoli qui disaient que le sous-marin conventionnel avait encore de beaux jours devant lui. Et câest lâatome qui lâemporta. Le premier projet se matĂ©rialisa sous la forme du prototype Q.244 Gymnote - 2 en rĂ©fĂ©rence au premier du nom. Il fĂ»t mis sur cale Ă Cherbourg en 1956 et dĂ©passait en dimensions tout ce que lâon pouvait imaginer mĂȘme le « Surcouf » avec ses 3500 Tonnes.
Longueur : 109,5 mĂštres
DiamĂštre de la coque Ă©paisse : 8,50 mĂštres
Déplacement : 4400 tonnes en surface et 5400 tonnes en plongée
Vitesse maxi : 23 noeuds
Immersion maxi : 250 mĂštres
Autonomie espérée à la mer : 90 jours à puissance nominale.
Autres chiffres :
Long de 113,75 m, large de 11,70m, DĂ©placement 6500 Tonnes
CâĂ©tait le prĂ©curseur des sous-marins Ă venir. Ce sous-marin Ă©tait destinĂ© Ă ĂȘtre armĂ© de torpilles (Huit Tubes et 20 torpilles de rĂ©serve) et Ă©ventuellement de missiles aĂ©rodynamiques. Il y eut aussi dâĂ©normes problĂšmes Ă rĂ©soudre et sur le plan technique, lâoption retenue, par la force des choses, dâun rĂ©acteur Ă uranium naturel et Ă eau lourde conduisit Ă une sorte dâaberration : la chaufferie rĂ©alisable ne rentrait pas dans le sous-marin.
La coque du Q.244 Gymnote - 2 resta donc Ă lâabandon Ă lâarsenal de Cherbourg avant quâon ne lâutilise Ă des fins plus glorieuses.
Gymnote, Numéro de coque Q 244
Un numéro de coque correspond à un nom de projet. Ce nom est choisi bien en amont lors des expressions du besoin, des accords de principes et de la signature du programme naval.
Le dĂ©but de la construction est gĂ©nĂ©ralement marquĂ© par une succession dâĂ©vĂ©nements particuliers :
DĂ©finition dâun nom de projet, qui en principe sera dans la plus part des cas, celui utilisĂ© lors du « Lancement », et du NumĂ©ro de Coque suivant lâordre du MaĂźtre dâOuvrage : la Marine Nationale.
Le MaĂźtre dâĆuvre est chargĂ© du procĂ©dĂ© industriel de fabrication choisi.
Symboliquement, le dĂ©but de la construction peut-ĂȘtre la dĂ©coupe de la premiĂšre tĂŽle.
Exemple :
Cartouches des plans de réalisations des sous-marin (M6) Conquérant- Sfax-Casabianca
Merci pour cet article trÚs bien documenté.
particuliÚrement intéressant
Les Ă©tapes de la vie dâun navire de guerre
Suite
Un bùtiment est dit « en construction » depuis sa mise en chantier jusqu'à la date du premier armement pour essais.
La rĂ©alisation dâun navire de guerre se distingue par lâabsence de dĂ©monstrateur ou prototype, le premier de la sĂ©rie joue ce rĂŽle.
Sauf cas de nĂ©cessitĂ© absolue, le projet devra ĂȘtre menĂ© jusquâĂ terme.
PremiĂšre Ă©tape de la construction du bĂątiment
La mise sur cale :
La construction est gĂ©nĂ©ralement liĂ©e au procĂ©dĂ© de fabrication en fonction des moyens de mise Ă lâeau.
Durant les années cinquante, et plus tard aussi, dans les ateliers de la DCAN/ DCN, les tronçons formés de tÎles cintrées puis soudées étaient calés sur une rampe inclinée.
Dans ce schĂ©ma de construction, la coque est assez peu remplie au lancement du sous-marin. On y rentre essentiellement, avant de la refermer dĂ©finitivement par assemblage des tronçons, les gros ensembles qui ne pourraient pas pĂ©nĂ©trer ultĂ©rieurement par les brĂšches. Ces ouvertures, rondes ou rectangulaires, effectuĂ©es dans la coque Ă©paisse, permettent par la suite lâamĂ©nagement intĂ©rieur, et les entretiens ou rĂ©parations importants. Ces brĂšches sont obturĂ©es par des panneaux autoclaves boulonnĂ©s.
Un tronçon du Narval
Au cours de cette pĂ©riode, le navire reçoit un noyau d'Ă©quipage dĂ©signĂ© pour leur qualification. Il a la charge de suivre les travaux. Suivant lâavancement du chantier, un officier de marine, dĂ©signĂ© par le ministre de la dĂ©fense prend la direction de cet Ă©quipage. En principe il sera appelĂ© Ă exercer le commandement du navire lorsqu'il entrera en armement pour essais »
En fonction de lâavancement du chantier, certains travaux sont rendus plus malaisĂ©s, voire impossibles, par lâinclinaison permanente de la cale. Une des consĂ©quences en est que lâon souhaite procĂ©der au lancement dĂšs que possible, afin de retrouver une position horizontale plus confortable.
Partie de coque Ă©paisse et ballasts (Narval)
Pendant la construction, la mise Ă flot est le moment emblĂ©matique, qui consacre la naissance du navire. Cet instant Ă©tant liĂ© au processus industriel, nâest pas dĂ©taillĂ© par les textes officiels.
Cependant, il peut faire lâobjet dâune cĂ©rĂ©monie particuliĂšre (Invitation dâhommes politiques, champagne, marraine). Le nom est officialisĂ© durant cette reprĂ©sentation.
Plus sĂ©rieusement, il permet dâapprĂ©hender sa flottabilitĂ© et son comportement afin dâajuster le mĂ©tacentre diffĂ©rentiel (Relation entre centre de gravitĂ© et centre de carĂšne). Durant la pĂ©nĂ©tration dans lâeau et sa stabilisation il est filmĂ©, photographiĂ©. Cette observation est facilitĂ©e par des marquages sur la coque.
En France, depuis les années quatre-vingt-dix, ce mode opératoire est définitivement abandonné.
AprĂšs son lancement, le navire est Ă©chouĂ© dans un bassin, posĂ© sur une ligne de tins horizontale. Cet amĂ©nagement permet dây mener les travaux de montage et dâarmement, ainsi que les essais prĂ©liminaires au dĂ©part Ă la mer.
Armement pour essais
Un bùtiment en construction passe dans la position « armé pour essais » lorsque les travaux sont assez avancés et permettent à l'équipage de vivre à bord.
Ceci nâest valable que pour les bĂątiments de surface.
A ce stade, la viabilité est impossible à bord des sous-marins.
La base assure logement et bureaux pour lâĂ©quipage. LâĂ©quipe de service chargĂ©e de la suretĂ© et de la sĂ©curitĂ©, suit la bonne marche des travaux Ă bords, rĂ©alisĂ©s par le personnel de la lâarsenal.
Essais préliminaires
Les essais préliminaires se déroulent pendant la période d'armement pour essais.
- Des essais prĂ©liminaires de certaines installations sâeffectuent dans les ateliers avant montage, puis Ă bords. Des vĂ©rifications et contrĂŽles nĂ©cessitent des procĂ©dures particuliĂšres : Gammagraphie des soudures concernant les organes importants.
Les essais machines et chaufferie nuclĂ©aire sâeffectuent dans un premier temps Ă lâaide dâune chaudiĂšre classique. AprĂšs embarquement du combustible, la premiĂšre « Divergence » est suivie dâessais dâextraction de puissance.
- Lâensemble des appendices de la coque tel que le sas passerelle, schnorchel, les aĂ©riens, les tubes lance torpilles / missiles, de mĂȘme lâappareillage sĂ©curitĂ© plongĂ©e sont vĂ©rifiĂ©s Ă©tanches et fonctionnels.
Les procĂšs-verbaux, signĂ©s par lâArsenal et lâĂ©quipage en charge, sont consignĂ©s par la DGA et CPPE.
Ils se concluent par l'essai de prĂ©sentation aux essais officiels qui est destinĂ© Ă montrer que les essais officiels Ă la mer peuvent ĂȘtre entrepris.
Essais constructeurs Ă la mer,
âą Ils sont effectuĂ©s Ă lâissue dâune revue de sĂ©curitĂ© maritime initiale (Ă©tablissement du rĂ©fĂ©rentiel), et la dĂ©livrance dâun titre civil provisoire de navigation, par une autoritĂ© compĂ©tente, gĂ©nĂ©ralement les Affaires Maritimes. La sanction des essais constructeurs est de la responsabilitĂ© du maĂźtre d'Ćuvre industriel.
âą Dans le cas dâun sous-marin, une plongĂ©e statique est rĂ©alisĂ©e afin de sâassurer de la concordance de la pesĂ©e avec la flottabilitĂ© calculĂ©e.
Essais réglementaires
âą La sanction est de la responsabilitĂ© dâune sociĂ©tĂ© de classification. Du personnel Ă©tatique peut ĂȘtre prĂ©sent comme observateur.
Essais contractuels
⹠Le service prescripteur est un organisme étatique DGA et/ou CPPE, en assure le contrÎle, et notifie la réception.
Essais officiels
âą comprenant notamment des Ă©preuves d'endurance et de consommation de l'appareil propulsif, en particulier un essai Ă la puissance maximale.
Le bĂątiment doit rĂ©pondre, en plus des caractĂ©ristiques techniques, aux critĂšres propres au besoin militaire. Câest lâobjet de la vĂ©rification des caractĂ©ristiques militaires (VCM) par la CPPE, suivant un processus de qualification.
Le président de la CPPE, délégué du chef d'état-major de la marine (CEMM), délivre :
« L'octroi dâautorisation de naviguer des bĂątiments de la Marine Nationale relevant du chef d'Ă©tat-major de la marine, en tant qu'autoritĂ© du pavillon ».
Traversée de Longue Durée
A la fin de leur pĂ©riode d'armement, les bĂątiments exĂ©cutent une pĂ©riode Ă la mer qui permet de vĂ©rifier la fiabilitĂ© et l'endurance des Ă©quipements dans des conditions variĂ©es, ainsi que la capacitĂ© dâintĂ©gration dans les forces.
« TraversĂ©e de Longue DurĂ©e depuis 2007 elle sâintitule « la phase 2 de la vĂ©rification des caractĂ©ristiques militaires » (VCM P2).
Une commission supĂ©rieure d'armement (CSA) se rĂ©unit en principe aprĂšs cette pĂ©riode pour prononcer lâadmission au service actif.
AprĂšs lâadmission au service actif
Les positions des bĂątiments de la marine aprĂšs leur admission au service actif sont les suivantes :
âą bĂątiment en service :
âą armĂ© : bĂątiment disponible, Ă©quipage au complet, prĂȘt Ă remplir toute mission.âą IndisponibilitĂ© pour entretien : IE - (maintenance courante programmĂ©e)
⹠Indisponibilité pour entretien et réparation IPER - (à caractÚre plus important, curatifs ou prévisionnels)
⹠en grande réparation : bùtiment indisponible pour une durée limitée. (grand carénage ou refonte)
âą en complĂ©ment : le matĂ©riel est disponible (Ă©ventuellement avec des rĂ©serves). Il dispose dâun effectif en personnel suffisant pour assurer lâentretien courant. Il peut ĂȘtre rĂ©armĂ© rapidement si besoin.
âą en rĂ©serveâŠ
- normale » : Son utilisation nâest momentanĂ©ment pas envisagĂ©e, mais son rĂ©armement peut intervenir sans travaux importants, dans des dĂ©lais dĂ©terminĂ©s. Un noyau dâĂ©quipage avec un commandant peut rester affectĂ©.
- spĂ©ciale » : BĂątiment indisponible au matĂ©riel ; des travaux de longue durĂ©e (indĂ©terminĂ©e), seraient nĂ©cessaires pour le rendre disponible. Il nây a normalement plus de personnel affectĂ© pour en assurer lâentretien.
⹠bùtiment condamné: Bùtiment reconnu impropre à toute utilisation militaire.
RĂ©flexion au sujet de la construction du Q 244
Il sâagit dâune rĂ©flexion personnelle, donc par nature partiale. Certains la trouveront discutable et abrupte, mais elle ne devrait pas ĂȘtre repoussĂ©e sans considĂ©ration.
En prenant comme référence le colloque, « 1899 / 1999, un siÚcle de construction sous-marine »,
qui sâest tenu les 25 et 26 octobre 1999 Ă Cherbourg.
Lors dâune confĂ©rence :
lâintervenant, ancien responsable de lâECAN Indret (Nantes), affectĂ© au DPN (CEA) Ă partir de 1959 dĂ©clarait :
- « Le point fort de cette quĂȘte fut ma rencontre, courant juillet (ndr : annĂ©e 1958 ou 1959 ???), Ă l'occasion d'un dĂ©jeuner Ă la cantine de Saclay, avec Jean-Louis Andrieu, commandant rĂ©putĂ© de sous-marins, dĂ©signĂ© pour commander le Q 244. AprĂšs quelques Ă©tincelles, le courant passa, ce qui permit de constituer un tandem d'une efficacitĂ© redoutable, en rĂ©alisant une alliance Ă©troite et inĂ©dite entre les points de vue technique et opĂ©rationnel ».
Jean-Louis Andrieu : Commandant du sous-marin Marsouin en 1952.
En 1955, il était désigné pour suivre les travaux de construction du Q244, premier sous-marin nucléaire.
Instruit de la chose militaire, et rompu aux procĂ©dures en usage dans la Marine Nationale, il est aisĂ© de comprendre quâun Ă©quipage sera affectĂ© Ă un bĂątiment, et non pas Ă une coque numĂ©rotĂ©e.
Dans ce mĂȘme colloque, un autre ancien responsable (DCAN) traitant de la « La reprise de la construction des Sous-Marins aprĂšs 1945 », disait :
- « De l'aventure Q 244 et de ses rĂ©percussions Ă Cherbourg, je dirai peu de choses, car ce programme suivi par Devauchelle, qui y a laissĂ© une partie de sa santĂ©, Ă©tait entourĂ© d'un secret que je ne cherchais pas Ă percer, ayant d'autres prĂ©occupations, pour moi prioritaires. Mes seules retombĂ©es ont Ă©tĂ© : - mon intervention en 1956 pour l'achat, tardif, d'une machine de cintrage des tĂŽles, car j'Ă©tais chargĂ© des bĂątiments en fer, - une concurrence assez exacerbĂ©e pour l'affectation des dessinateurs et du personnel de chantier, entre le Q 244, les DaphnĂ© et les ArĂ©thuse, heureusement et sagement arbitrĂ©e par Perrin, notre chef de section constructions neuves âŠÂ».
On peut soupçonner le secret qui enveloppait sa construction. Secret bien relatif, si on considĂšre que les locaux des dessinateurs avaient pignon sur les formes de construction, et que les ouvriers pouvaient circuler librement de lâune Ă lâautre.
Quand le projet fut abandonnĂ©, on dĂ©clara quâil sâagissait dâun prototype, afin de justifier les fonds engloutis. On recouvrit ainsi dâun voile pudique ce chantier. Et pourtant, il nây avait aucune honte Ă avoir. Le projet, certes avec dĂ©lais supplĂ©mentaires, aurait pu aboutir Ă condition de disposer Ă ce moment-lĂ de lâuranium enrichi. Nous aurions pu disposer de ce sous-marin expĂ©rimental Ă propulsion nuclĂ©aire dĂšs les annĂ©es soixante.
Le nom Narval apparaßt sur cette photo datée de 1952 lors de la mise sur cale
Remarque : le N° de coque ne figure pas.
Sur ce cliché pris aprÚs la décision d'abandonner la construction, seul figure le N° de coque. Le lancement n'aura jamais lieu.
On remarquera l'état d'avancement, ce n'était pas un amas de ferraille oublié.
Le projet dâun « Sous-Marin Atomique », suivant la nomination de lâĂ©poque, Ă©tait inscrit dans un programme global dĂ©finissant lâutilisation du nuclĂ©aire pour la propulsion naval dâune part, mais aussi dâautre part, lâaccession Ă la « bombe atomique ».
Le projet Gymnote-Q244 ne fut jamais achevĂ© pour des raisons dĂ©jĂ Ă©voquĂ©es. Les travaux cessĂšrent en cours dâannĂ©e 1958. Probablement que le choix du nom Gymnote Ă©tait dĂ» Ă une volontĂ© de confondre ce projet avec les constructions en cours. Pour la Marine Nationale, ce sous-marin nâa jamais existĂ© car jamais armĂ© ni basculĂ© au service actif.
A lâĂ©tranger, dans certains ouvrages spĂ©cialisĂ©s, on nâhĂ©site pas Ă citer Q 244 associĂ© au nom Gymnote.
Die Politik der latenten Proliferation
MilitĂ€rische Nutzung âfriedlicherâ Kerntechnik in Westeuropa © 1994 Auteur: Roland Kollert,
Tableau page 255
Probablement que le nom « Gymnote » aurait été changé lors du « lancement », pour un plus évocateur en terme de puissance ou de reconnaissance. On a pu observer par la suite, de tels changements, alors que les réalisations étaient en cours.
Ce navire dâailleurs nâexistait pas, il Ă©tait gardĂ© secret, on lâa cachĂ© aux yeux du parlement, le financement de celui-ci faisait lâobjet dâune procĂ©dure particuliĂšre gouvernementale. Le budget allouĂ© nâĂ©tait pas soumis au Conseil Ă©conomique ni Ă lâAssemblĂ©e ( 4Ăšme rĂ©publique).
Ces derniers points seront détaillés dans le prochain chapitre : « GenÚse du sous-marin nucléaire français ».
A suivre ...
.
Parfait me concernant !
Merci et vivement la suite. (Je ne connais que trop bien le travail que ça demande !)
GenÚse du sous-marin nucléaire français
Si les Etats Unis ont Ă©tĂ© les premiers Ă accĂ©der Ă lâĂ©nergie nuclĂ©aire, en produisant les premiĂšres « Bombes Atomique », câest parce quâelle a profitĂ© de certaines opportunitĂ©s. Elle a su protĂ©ger et favoriser pour son compte, les recherches de brillants scientifiques fuyant la guerre, lâoccupation, un rĂ©gime dictatorial ou les persĂ©cutions Ă cause de leur origine.
Mais il ne faudrait pas oublier que les plus grandes pages de « lâHistoire de lâAtome au NuclĂ©aire », ont Ă©tĂ© Ă©crites par des savants europĂ©ens, et certaines non des moindres par des Français.
De lâAtome antique Ă lâAtome quantique
Vers 450 avant J.-C., le philosophe grec DĂ©mocrite imagine que la matiĂšre est formĂ©e d'un assemblage de particules « insĂ©cables, impassibles et impĂ©rissables » : les atomes (du grec atomos : qui ne peut pas ĂȘtre coupĂ©). Il faut pourtant attendre le tout dĂ©but du XIXe siĂšcle pour que la thĂ©orie atomique soit enfin scientifiquement formulĂ©e.
Aristote philosophe grec IIIĂšme, siĂšcle avant JC conteste cette existence par la thĂ©orie dite des quatre Ă©lĂ©ments selon laquelle toute matiĂšre est faite des 4 substances indestructibles : eau, feu, air, terre. Son prestige est tel quâil faut attendre un vingtaine de siĂšcles pour que lâidĂ©e atomiste soit Ă©voquĂ©e Ă nouveau.
Au moyen-ùge, l'alchimie née des progrÚs de la métallurgie et de l'insuffisance de la théorie des 4 éléments, représente la diversité de la matiÚre. Le dessein de l'alchimie était d'obtenir la transmutation des métaux pauvre, le cuivre par exemple, en métaux nobles tels que l'or. La démarche de l'alchimie comme celle de l'astrologie établissait des liens symboliques qui unissaient le microcosme au macrocosme (monde des planÚtes). Par exemple, l'élément Plomb était associé à la planÚte Saturne. Les alchimistes développÚrent l'observation, l'expérimentation, la mesure et la classification des éléments: l'alchimie donne naissance à la chimie.
En 1805, John Dalton reprend lâhypothĂšse atomique. Il suppose que les atomes se combinent entre eux sans modification de leur nature : un atome dâoxygĂšne associĂ© Ă deux atomes dâhydrogĂšne donne de lâeau tandis que deux atomes dâoxygĂšne associĂ©s Ă un atome de carbone donnent du gaz carbonique. Contrairement Ă DĂ©mocrite, ce savant ne diffĂ©rencie plus les atomes par leur forme mais par leur masse. Il voit les atomes comme des sphĂšres.
En 1869, le chimiste russe Dimitri Mendeleïev réalise un tableau qui classe tous les éléments chimiques alors connus d'aprÚs leurs propriétés chimiques. Ce tableau servira plus tard à classer méthodiquement tous les atomes naturels et artificiels, d'aprÚs leur numéro atomique, suivant leur nombre de protons.
1895 RĂNTGEN Conrad (Allemand), cherche lâorigine de la lumiĂšre blafarde issue dâun tube cathodique. En interposant un carton entre le tube et l'Ă©cran fluorescent qui sert de dĂ©tecteur, le squelette de sa main apparaĂźt sur lâĂ©cran. Il venait de rĂ©aliser la premiĂšre radiographie. Cette invention va connaĂźtre trĂšs vite des applications mĂ©dicales.
Faute de comprendre encore la nature du phénomÚne, on parlera de rayons «X».
1896 BECQUEREL Henri (Français), cherche une explication à la fluorescence, propriété
de certains corps de restituer la lumiÚre. Les sels d'uranium font apparaßtre les corps, comme les rayons X, alors que nulle électricité ni lumiÚre ne sont appliquées. Il les appelle modestement «rayons uraniques».
en 1897 Thompson, découvre le premier composant de l'atome: l'électron, particule de charge électrique négative.
En 1904, il propose un premier modÚle d'atome, surnommé depuis "le pudding de Thompson" :
lâatome est une sphĂšre remplie d'une substance Ă©lectriquement positive et fourrĂ©e d'Ă©lectrons nĂ©gatifs "comme des raisins dans un cake".
1898 CURIE Pierre et marie (Français), Marie (SKLODOWSKA origine polonaise) effectue des recherches sur le rayonnement « X » de Becquerel. En manipulant du minerai dâuranium provenant de BohĂšme, elle dĂ©couvre que le thorium a les mĂȘmes propriĂ©tĂ©s que lâuranium. Mais ce minerai d'uranium est plus actif que l'uranium lui-mĂȘme. En compagnie de Pierre, ils vont isoler un premier Ă©lĂ©ment, auquel ils donneront le nom de polonium, puis un second encore plus actif : le radium. ParallĂšlement, ils Ă©tudient les diffĂ©rents types de rayonnements rencontrĂ©s. Pierre et Marie CURIE ont ainsi mis en Ă©vidence la propriĂ©tĂ© particuliĂšre de certains Ă©lĂ©ments : « la radioactivitĂ© ».
1903 Pierre et Marie Curie ainsi que Henri Becquerel reçoivent le prix Nobel de physique.
En 1912, Rutherford physicien néo-zélandais, découvre le noyau atomique. Son nouveau modÚle d'atome montre que sa charge électrique est positive, et que l'essentiel de sa masse est concentré en un noyau quasi-ponctuel.
Les Ă©lectrons de l'atome se dĂ©placent autour de ce noyau tels des planĂštes autour du Soleil, d'oĂč le nom de modĂšle d'atome planĂ©taire.
Rutherford comprend que le noyau est lui-mĂȘme composĂ© de nuclĂ©ons. Ces nuclĂ©ons sont de deux sortes:
- de charge positive, c'est un proton.
- de charge neutre, c'est un neutron
Le neutron sera effectivement découvert en 1932 par Chadwick.
Le modĂšle planĂ©taire de l'atome a un gros dĂ©faut. Les Ă©lectrons peuvent Ă©mettre de la lumiĂšre sous certaines conditions, dans une ampoule Ă©lectrique par exemple. Ils perdent alors de l'Ă©nergie et devraient donc se rapprocher du noyau jusqu'Ă s'y Ă©craser. Un tel atome nâest donc pas stable.
en 1913 Niels Bohr crĂ©e un nouveau modĂšle d'atome: les orbites des Ă©lectrons ne sont pas quelconques mais "quantifiĂ©es". Seules certaines orbites particuliĂšres sont permises. Ce n'est que lorsque lâĂ©lectron saute d'une orbite Ă l'autre qu'il peut Ă©mettre ou absorber de la lumiĂšre (Photon).
Albert Einstein s'intéresse à cette théorie dÚs sa publication. Il cherche en vain, le lien traitant à la fois
mécanique classique et mécanique quantique. Le modÚle de Bohr est confirmé expérimentalement quelques années plus tard.
Anecdote :
En octobre 1927, Bohr rencontre pour la premiÚre fois Albert Einstein avec qui il aura de trÚs fréquents entretiens jusqu'en 1935. Einstein défend le caractÚre provisoire de la théorie quantique et ne la considÚre pas satisfaisante. Bohr, au contraire, considÚre qu'il s'agit d'une théorie achevée. Lors d'un débat, Bohr se disputait avec Einstein à propos de la réalité de la physique quantique. à un moment donné Einstein, excédé, jeta à Niels Bohr :
- « Dieu ne joue pas aux dés ! », ce à quoi Bohr répondit :
- « Qui ĂȘtes-vous, Einstein, pour dire Ă Dieu ce qu'il doit faire ? ».
VERS LA PHYSIQUE QUANTIQUE
Le modÚle de Bohr est le dernier modÚle obéissant à la physique classique, c'est-à -dire la physique qui explique les mouvements et les phénomÚnes existant à notre échelle humaine. Ces modÚles d'atomes sont donc faciles à comprendre et à se représenter. Ce modÚle est toujours proposé pour le grand public.
Eh bien ce modĂšle est faux !
A partir de 1925 un nouveau formalisme mathĂ©matique dĂ©montre qu'il est impossible de connaĂźtre en mĂȘme temps la vitesse et la position de l'Ă©lectron. On ne considĂšre plus l'Ă©lectron comme une petite boule, mais comme quelque chose qui serait Ă l'origine d'un nuage appelĂ© nuage Ă©lectronique.
En 1932, la composition de l'atome sera définitivement établie. Le noyau apparaßt comme un assemblage de "grains de matiÚre" positifs et neutres, appelés respectivement "protons" et "neutrons", le tout baignant dans un nuage électronique.
A l'échelle atomique, de nouvelles lois s'appliquent. Ces lois appartiennent à une physique trÚs éloignée de nos concepts courant: la physique quantique.
La continuité scientifique
On peut s'étonner que les idées émergent, tantÎt dans un pays, tantÎt dans un autre, dans une continuité apparente. Il s'agissait de petits labos comprenant une poignée de chercheurs, installés dans des locaux modestes avec des équipements trÚs légers. La seule maniÚre de préserver l'antériorité d'une expérience, à des fins de récompense pour la découverte, est de publier un article dans une revue scientifique, dont s'emparent aussitÎt les concurrents pour tenter d'aller plus loin.
A suivre : LâĂ©popĂ©e nuclĂ©aire en France de 1932 Ă 1939 ...
Rah ! Bien.
La suiiiite
LâĂ©popĂ©e nuclĂ©aire en France de 1932 Ă 1939
Avec les neutrons, les scientifiques disposent d'un «nouveau jouet », d'un nouveau projectile, qui prĂ©sente le grand avantage de ne pas ĂȘtre repoussĂ© par la charge Ă©lectrique du noyau, quand on essaie de l'atteindre.
La Physique Nucléaire va pouvoir commencer.
Les noms d'IrÚne et de Frédéric JOLIOT-CURIE resteront attachés à la radioactivité artificielle.
(IrÚne Curie, fille de Pierre et Marie Curie et mariée à F. Joliot)
Fin 1933, Ă partir d'une expĂ©rience de bombardement d'une feuille d'aluminium par une source intense de polonium, ils mettent en Ă©vidence la production de phosphore 30 radioactif, isotope du phosphore 30 naturel. Cela signifie que l'on est capable de fabriquer par irradiation des Ă©lĂ©ments ayant les mĂȘmes propriĂ©tĂ©s que les Ă©lĂ©ments naturels, plus une : la radioactivitĂ©. L'isotope radioactif pourra ĂȘtre repĂ©rĂ©, lĂ oĂč l'Ă©lĂ©ment naturel est indĂ©tectable. On voit rapidement toutes les applications qu'il est possible d'en tirer, notamment dans le domaine mĂ©dical. La scintigraphie de la thyroĂŻde, par exemple, est possible grĂące Ă une injection d'iode radioactif, qui va, comme l'iode ordinaire, se concentrer dans la glande.
En 1935 la famille Curie complÚte sa collection de Prix Nobel par une distinction supplémentaire en 1935.
1938 : La Fission :
Lise MEITNER et Otto FRISCH, deux Autrichiens-Allemands exilés en SUEDE, qui trouvent en décembre 1938 l'explication capitale de l'énergie nucléaire : le phénomÚne de la Fission. Un neutron lancé contre 'un noyau d'uranium le fractionne en deux parties (Produits de Fission), en dégageant une quantité considérable d'énergie.
Défaut de masse = Energie Nucléaire (énergie de liaison des nucléons)
La fission du noyau entraĂźne une perte de masse de 1 % environ et l'on calcule que 50 milligrammes dâuranium produisent autant dâĂ©nergie que 1 tonne de TNT.
Trois DĂ©couvertes capitales
1934 Celle de l'Italien Enrico FERMI, constatant que les neutrons ralentis par un trajet dans la paraffine par exemple ont une efficacité beaucoup plus grande que les neutrons ordinaires. Résultat paradoxal qui s'explique par la physique quantique. Des matériaux ralentisseurs, «modérateurs », comme l'eau lourde, seront donc à prévoir dans les futures installations.
1939 (FĂ©vrier) Celle de Niels BOHR, en fĂ©vrier, qui met en Ă©vidence le fait que sur les deux isotopes contenus dans l'uranium naturel : U238 et U235, seul le second se prĂȘte Ă la fission, on dit qu'il est «fissible». C'est hĂ©las le plus rare (0,72 % de l'uranium) ; d'oĂč l'intĂ©rĂȘt d'augmenter cette proportion pour obtenir un combustible plus rĂ©actif par des procĂ©dĂ©s d' « enrichissement » de l'uranium.
1939 (Avril) Celle enfin, et la plus essentielle, de Frédéric JOLIOT, Francis PERRIN, Lew KOWARSKI et Hans HALBAN, les quatre «Mousquetaires» français, qui publient, trÚs peu de temps avant leurs concurrents américains, un article dans la revue «NATURE» démontrant que la fission du noyau de l'uranium s'accompagne de l'émission de 3,5 neutrons (nombre ramené plus tard à 2,4) qui peuvent à leur tour fragmenter d'autres noyaux et ainsi de suite, par un phénomÚne de «réaction en chaßne».
Cette réaction en chaßne exponentielle pourrait générer en une fraction de seconde des énergies colossales.
LeĂł SzilĂĄrd scientifique hongrois, ayant travaillĂ© avec Einstein et connaissant les travaux des français, Ă©crivit une lettre Ă Joliot le 2 fĂ©vrier 1939, pour lui signifier que la rĂ©alisation de telles bombes Ă©tait « extrĂȘmement dangereuse, plus particuliĂšrement entre les mains de certains gouvernements », et il demanda Ă Joliot de cesser toute publication ouverte sur ce sujet. Quelques jours plus tard, le 14 fĂ©vrier, le physicien français adressa au ministĂšre de lâArmement une note secrĂšte de cinq pages dans laquelle il expliqua comment rĂ©aliser un engin explosif sur la base dâune rĂ©action en chaĂźne et traitant du « perfectionnement des charges explosives » classĂ© secret dĂ©fense.
Début mai 1939, pour protéger la propriété de ses travaux, Joliot, avec son équipe, déposa les trois célÚbres brevets. Ces brevets couvrent deux domaines importants qui touchent à la réalisation :
⹠des réacteurs nucléaires électrogÚnes
⹠d'armes nucléaires
On peut regretter que la guerre nous ait privés des retombées économiques de ces brevets.
Tout a été trouvé et tout reste à faire. La course à la réaction en chaßne est engagée.
LE TEMPS DE LA GUERRE 1939 â 1945
1939 (Eté) L'Europe subit menaces et conflits. Les physiciens, habités par leur enthousiasme alors qu'ils se sentent si prÚs du but, veulent croire encore que la science poursuivra sa route selon ses propres critÚres. La guerre va tout emporter dans une autre logique.
Le 2 août, A. EINSTEIN écrit au Président ROOSEVELT pour alerter son attention sur les efforts déployés par l'Allemagne, pour la mise au point d'une arme nucléaire. Le 1er septembre, la guerre éclate on frémit à l'idée,
que les nazis peuvent ouvrir les hostilités en possession de la bombe.
En France, les «quatre mousquetaires» et leurs associés se mettent pourtant à l'ouvrage. Il s'agit d'abord de rassembler les éléments indispensables à la réalisation d'une installation expérimentale de réaction en chaßne :
une «pile atomique».
L'uranium est trouvĂ© auprĂšs de l'Union MiniĂšre du Haut Katanga au Congo sous forme d'un prĂȘt de 7 tonnes d'oxyde. Quant au modĂ©rateur, l'eau lourde, production exclusive de la StĂ© Norsk Hydro en NorvĂšge, il fait l'objet d'une Ăąpre compĂ©tition entre lâAllemagne et la France qui finira par l'emporter de haute lutte en s'appropriant le stock existant de 167 litres.
L'avance allemande vient bousculer tous les plans. Le Ministre de l'armement, Raoul DAUTRY demande à l'équipe française de se replier sur l'Angleterre, HALBAN et KOWARSKI la rejoignent le 18 juin 1940 avec le stock d'eau lourde. Joliot-Curie préfÚre rester au chevet de sa femme malade. Il tente de poursuivre ses recherches sur place ; il militera dans la résistance. Ainsi doit s'interrompre une entreprise que les Français avaient les meilleures chances de réussir les premiers.
Il revient à la Grande-Bretagne de prendre le relais, pour une courte période cependant. Des Physiciens allemands réfugiés en Angleterre démontrent la possibilité de fabriquer une bombe avec 5 kg d'U235 et le Comité MAUD chargé des applications militaires de la fission évalue à trois ans le temps nécessaire pour y parvenir. La réalisation d'un tel projet s'avÚre impossible dans un pays exposé à des bombardements incessants et qui doit consacrer toute son énergie à résister à un éventuel débarquement. L'initiative passe de l'autre cÎté de l'Atlantique.
Les Ătats-Unis Ă©taient dĂ©jĂ prĂ©parĂ©s Ă cette Ă©ventualitĂ©. DĂšs octobre 1941, la fusion des recherches anglaises et amĂ©ricaines est proposĂ©e. Elle connaĂźtra des soubresauts, mais se maintiendra toujours. Le 7 dĂ©cembre 1941, les Japonais attaquent Pearl Harbor prĂ©cipitant les Ătats-Unis dans la guerre. L'Ă©norme machine amĂ©ricaine se met en route et va Ă marche forcĂ©e. L'Europe reste prĂ©sente Ă travers l'Ă©quipe anglaise transfĂ©rĂ©e Ă MontrĂ©al, elle-mĂȘme renforcĂ©e par les physiciens français passĂ©s en Angleterre, auxquels se sont joints des Ă©lĂ©ments de la France libre Bertrand GOLDSCHMIDT, qui en faisait partie, a retracĂ© cet Ă©pisode dans «l'Aventure Atomique».
MANHATTAN PROJECT
Ce nâest quâau dĂ©but de lâannĂ©e 1942 que les Ătats-Unis initiĂšrent un programme visant Ă dĂ©velopper lâarme atomique. Cette dĂ©cision, notifiĂ©e par une instruction prĂ©sidentielle, fut prise peu aprĂšs lâentrĂ©e en guerre du pays suite Ă lâattaque surprise de Pearl Harbour le 7 dĂ©cembre 1941. Lâengagement du gouvernement amĂ©ricain dans le dĂ©veloppement de la bombe atomique se traduisit par le lancement le 16 aoĂ»t 1942 dâun vaste programme : le projet Manhattan, dont Robert OPPEHEIMER prendra la direction scientifique.
⹠Eté 1942 : lancement d'études sur l'enrichissement de l'uranium.
⹠2 décembre 1942 : divergence (démarrage de la réaction en chaßne) de la premiÚre pile atomique à Chicago,
Sous la direction de Enrico FERMI.
⹠Les années 1943 et 44 voient la création et le développement de 3 grands sites :
- OAK RIDGE, dans le TENNESSEE, pour la production d'uranium,
- HANFORD, dans l'Etat de Washington, pour la production de plutonium,
- LOS ALAMOS, dans le Nouveau Mexique, pour la fabrication des armes et les essais nucléaires.
Les travaux menĂ©s dans ce cadre aboutirent Ă lâexplosion du premier engin le 16 juillet 1945 dans le dĂ©sert du Nouveau Mexique.
Les Français au Canada
Dans une semi-clandestinité les Français évoluent à Montréal et sont tenus au secret le plus absolu sur leurs activités, y compris vis-à -vis de leur gouvernement.
le 11 juillet 1944 Ă Ottawa, dans une arriĂšre-salle isolĂ©e du siĂšge de la dĂ©lĂ©gation de la France libre, le français Jules GUERON, accompagnĂ© de deux autres compatriotes, Bertrand GOLDSCHMIDT et Pierre AUGER, rĂ©vĂ©lĂšrent au GĂ©nĂ©ral De GAULLE les perspectives de la fission et surtout les dĂ©veloppements en cours aux Ătats-Unis pour la mise au point dâune bombe atomique, dont ils estimaient le succĂšs quasi certain. Lâentretien dura seulement trois minutes. Le GĂ©nĂ©ral nâoubliera pas.
La prĂ©sence des scientifiques français au Canada permettra de rester dans la course et d'acquĂ©rir une expĂ©rience qui se rĂ©vĂšlera prĂ©cieuse par la suite. La participation de L. KOWARSKI Ă la construction de la grande pile canadienne Ă eau lourde de Chalk River, apportera toute lâexpertise nĂ©cessaire Ă la rĂ©alisation de la pile française ZOE, de mĂȘme concernant les travaux de B. GOLDCHMIDT sur l'extraction du plutonium.
Lâaboutissement du programme amĂ©ricain conduira Ă la fabrication des bombes:
⹠16 juillet 1945 : premiÚre explosion nucléaire expérimentale à ALAMOGORDO
⹠6 août 1945 : destruction d'HIROSHIMA par une bombe à l'uranium 235
⹠8 août 1945 : destruction de NAGASAKI par une bombe au plutonium
La Renaissance de lâactivitĂ© nuclĂ©aire en France
PARIS est libéré en août 1944.
La FRANCE reprend peu à peu possession de son territoire. DÚs le mois de décembre 1944, HALBAN fait un aller et retour Montréal - Paris pour prendre contact avec JOLIOT à propos des brevets français. Fin 1945, la guerre terminée, les «Canadiens» retrouvent la « MÚre Patrie » et l'équipe se reconstitue tout naturellement autour de Frédéric JOLIOT-CURIE, dont le prestige demeure incontesté. Il a été nommé Directeur du CNRS.
A la tĂȘte de la France, le GĂ©nĂ©ral De GAULLE prĂ©side le gouvernement provisoire. L'une des premiĂšres dĂ©cisions est la crĂ©ation d'un organisme spĂ©cifique chargĂ© de dĂ©velopper les applications de l'Ă©nergie atomique. Cela met en Ă©vidence l'enjeu stratĂ©gique du nuclĂ©aire et les potentialitĂ©s qu'il laisse espĂ©rer dans le domaine de l'Ă©nergie.
L'Ordonnance du 18 octobre 1945 instituant le COMMISSARIAT A L' ENERGIE ATOMIQUE en fait une structure trĂšs originale parmi les Ă©tablissements publics français. Il est trĂšs proche du Gouvernement et pour ainsi dire mĂȘlĂ© Ă lui. Son ComitĂ©, Ă©quivalent d'un Conseil d'Administration, est prĂ©sidĂ© par le Chef du Gouvernement lui-mĂȘme. Mais il dispose en mĂȘme temps d'une grande libertĂ© d'action et sa gestion est rĂ©gie par le droit privĂ©. Autre particularitĂ© : deux responsables se partagent la direction du CEA :
âą Le Haut-Commissaire pour les questions scientifiques et techniques.
⹠L'Administrateur Général, délégué du Gouvernement, pour les attributions d'ordre administratif et financier.
Les deux premiers titulaires ne nous sont pas inconnus, puisqu'il s'agit de Frédéric JOLIOT-CURIE en qualité de Haut-Commissaire et de Raoul DAUTRY, l'ancien Ministre de l'Armement, pour le poste d'Administrateur Général. Ce sont, pourrait-on dire, des hommes du sérail. La route est libre pour reprendre l'entreprise interrompue.
A suivre ...
Références :
lâĂ©nergie nuclĂ©aire en France de 1895 Ă nos jours - ConfĂ©rence tenue en Mars 2007. Alain MALLEVRE
Direction des applications militaires â C.E.A.
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Passionnant
Merci.
La reconstruction de la France et le Programme Nucléaire
En 1945, Raoul DAUTRY, ministre de la reconstruction et de l'urbanisme informe le général De GAULLE, alors président du Gouvernement provisoire, que le nucléaire bénéficierait à la reconstruction ainsi qu'à la Défense Nationale.
Et de mĂȘme dĂ©clarait FrĂ©deric JOLIOT-CURIE :
- « je vous la ferai, mon général, votre bombe !»
Lâeuphorie de la victoire Ă©tant passĂ©e, les rĂ©alitĂ©s financiĂšres pour relever le pays, et les tiraillements politiques conduisirent Ă une certaine amnĂ©sie concernant les engagements prononcĂ©s en faveur dâune France indĂ©pendante.
Le nuclĂ©aire militaire nâest plus une prioritĂ© :
- « je suis ministre de la reconstruction, pas de la destruction » dira Dautry.
Sous lâinfluence de JOLIOT, un mouvement pacifiste sâinstaure au sein du CEA.
Le 28 avril 1950, JOLIOT-CURIE est rĂ©voquĂ© de son poste de haut-commissaire du CEA par Georges BIDAULT, prĂ©sident du Conseil. Il lui fut reprochĂ© sa forte implication dans la diffusion de « lâAppel de Stockholm » et aussi ses sympathies envers le P.C.F. alors caisse de rĂ©sonnance de lâU.R.S.S. en plein contexte de guerre froide. Il avait dĂ©clarĂ© au cours d'un meeting d'avril 1950 :
- « Les savants communistes et progressistes ne donneront pas une miette de leur savoir pour la bombe atomique ».
Premier Plan Quinquennal
Dans ce contexte, la France rĂ©alise un programme nuclĂ©aire civil. La divergence en 1948 de la premiĂšre pile atomique expĂ©rimentale française (baptisĂ©e « ZoĂ© » va permettre dâenvisager dĂ©sormais le passage Ă un stade industriel. Les travaux du CEA reçoivent alors une impulsion dĂ©cisive au niveau politique en la personne dâun jeune dĂ©putĂ©, FĂ©lix GAILLARD, que Bertrand GOLDCHMIDT a sensibilisĂ© aux questions nuclĂ©aires. NommĂ© en aoĂ»t 1951, trĂšs vite, il impose lâidĂ©e dâun plan nuclĂ©aire Ă long terme. Ce plan quinquennal qui est votĂ© par le Parlement en 1952, sous le gouvernement dâAntoine PINAY prĂ©voit la construction de deux piles atomiques au graphite ainsi que lâusine dâextraction de plutonium correspondante, la prioritĂ© allant Ă lâĂ©poque Ă la voie de lâuranium naturel.
Si la finalitĂ© de ce plan est alors essentiellement civile, on a Ă lâesprit que lâextraction du plutonium est sans prĂ©juger de la dĂ©cision finale, la volontĂ© de laisser ouverte la voie menant au programme militaire. SuccĂ©dant en 1951 Ă DAUTRY comme administrateur gĂ©nĂ©ral, Pierre GUILLAUMAT tient fermement le cap dans cette direction en faisant front lâannĂ©e suivante Ă une campagne de presse hostile à « la dĂ©rive militariste » du CEA, puis en 1954 Ă une manifestation pacifiste de grande ampleur au sein mĂȘme du Commissariat.
LâannĂ©e 1954 marque un tournant dĂ©cisif, un certain nombre de circonstances convergent en effet et posent opportunĂ©ment la question du lancement possible dâun programme nuclĂ©aire militaire proprement français :
âą DiĂȘn BiĂȘn Phu : deux jours avant le dĂ©clenchement de lâoffensive contre le camp retranchĂ© français, le ComitĂ© de la DĂ©fense nationale considĂšre le 11 mars 1954 que la question dâune intervention aĂ©rienne massive contre les Ă©lĂ©ments ViĂȘt-minh doit ĂȘtre posĂ©e aux autoritĂ©s amĂ©ricaines. Fin mars, un ComitĂ© de dĂ©fense restreint arrive Ă la conclusion que seule une intervention militaire immĂ©diate, si possible nuclĂ©aire, est en mesure de sauver le contingent français. Du cĂŽtĂ© amĂ©ricain, on ne donne pas suite Ă cette demande.
âą La chute de DiĂȘn BiĂȘn Phu va produire un choc ; elle met en Ă©vidence les limites dâune alliance militaire incertaine avec Washington, mĂȘme sâil est exclu Ă lâĂ©poque de mener une politique militaire indĂ©pendamment de lâalliĂ© amĂ©ricain.
âą Dans une note adressĂ©e en mars 1954 Ă RenĂ© PLEVEN, alors ministre de la DĂ©fense, le chef dâĂ©tat-major gĂ©nĂ©ral des forces armĂ©es, le gĂ©nĂ©ral Paul ĂLY, souligne lâimportance du potentiel nuclĂ©aire. Il estime que ce potentiel devient un critĂšre dĂ©terminant dans la dĂ©finition dâune « grande puissance ».
Les chefs dâĂ©tat-major arrivent Ă la conclusion que la France ne peut diffĂ©rer son effort dans le domaine des armes nuclĂ©aires sans risquer dâĂȘtre devancĂ©e par dâautres puissances occidentales.
⹠« Lâalerte CED » : le projet de traitĂ© relatif Ă la CommunautĂ© europĂ©enne de dĂ©fense comporte une clause qui interdit aux Ătats membres dâentreprendre en toute libertĂ© un programme atomique militaire. Pierre GUILLAUMAT sâemploie Ă contrer vigoureusement la clause restrictive du projet de traitĂ© CED que le ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres ne lui avait mĂȘme pas signalĂ©.
âą Le gĂ©nĂ©ral De GAULLE sort de son silence et dĂ©clare en mars 1954 que si ce traitĂ© venait Ă ĂȘtre ratifiĂ©, la France serait encore plus dĂ©pendante de ses alliĂ©s. Elle ne disposerait plus dâelle-mĂȘme, câest-Ă -dire de sa propre armĂ©e et de lâaccĂšs aux armements nuclĂ©aires. La menace tombe lorsque le Parlement rejette le traitĂ© CED en aoĂ»t 1954.
âą Septembre-octobre 1954, le prĂ©sident du Conseil Pierre MENDES-FRANCE sâingĂ©nie Ă Ă©carter tous les obstacles juridiques et politiques qui prĂ©tendent encore interdire lâaccĂšs de la France au « club atomique ». Ainsi, lors de la confĂ©rence de Londres, la France parvient Ă obtenir un compromis qui ĂŽte toute contrainte dans ce domaine.
⹠de la réalisation de deux réacteurs nucléaires susceptibles de produire 70 à 80 kg de plutonium par an,
âą de la mise sur pied dâĂ©quipes scientifiques et techniques sous la responsabilitĂ© dâun Bureau dâĂ©tudes gĂ©nĂ©rales, BEG rattachĂ© au CEA,
âą de la crĂ©ation dâun centre dâessais au Sahara, ainsi que dâun rĂ©seau de dĂ©tection permanente des essais.
âą de lancer un programme de fabrication dâarmes nuclĂ©aires et de sous-marins nuclĂ©aires ;
⹠la décision serait gardée secrÚte ;
⹠enfin le ministre de la Défense présenterait un projet de décision devant le Conseil des ministres.
*** lorsque le ministre a dĂ©cidĂ© de donner des noms aux deux premiers sous-marins de Type 400 t dĂ©signĂ©s alors par leurs numĂ©ros de coque Q 235 et Q 236, sans doute mal conseillĂ©, il les a appelĂ©s Argonaute et ArĂ©thuse. Quelqu'un a alors fait remarquer qu'il y avait dĂ©jĂ un type Argonaute. En vertu de lâinfaillibilitĂ© du pouvoir, une dĂ©cision complĂ©mentaire a Ă©tĂ© prise: les sous-marins seront du type ArĂ©thuse. Aujourd'hui encore, il existe une confusion entre les deux noms et l'histoire de ces bĂątiments. A la page 225 du livre de Henri Le Masson, on peut lire «avant que l'ArĂ©thuse n'entre en service en octobre 1958». Et bien non, ce n'Ă©tait pas l'ArĂ©thuse, mais l'Argonaute.
âą de l'abondance des noyaux fissiles
âą des pertes dues aux neutrons qui quittent le cĆur du rĂ©acteur
⹠d'autres noyaux (matériaux) « neutrophages et stériles ».
âą InconvĂ©nients du rĂ©acteur U naturel :Le cĆur dâun tel rĂ©acteur nĂ©cessite un volume prohibitif pour une coque de sous-marin.
La conduite dâun tel rĂ©acteur ne correspond pas aux nĂ©cessitĂ©s militaires pour la propulsion.
âą Avantages :Combustible facile Ă rĂ©aliser en Ă©vitant lâenrichissement en U 5.
U 8 (uranium 238 présent à 99,7 %), certes « non fissile », est « Fertile »
⹠Rappelons-nous, en 1934 l'Italien Enrico FERMI, constatait que les neutrons ralentis par un trajet dans la paraffine ont une efficacité beaucoup plus grande que les neutrons ordinaires (Rapides). Résultat, des matériaux ralentisseurs «modérateurs », seront donc à prévoir dans les futures installations.
âą GrĂące Ă lâuranium 235 isolĂ© par NIER, John DUNNING put en mesurer le 2 mars 1940 la section efficace de fission par neutrons lents, et confirmer quâil Ă©tait le seul fissile comme lâavaient prĂ©vu BOHR et WHEELER.
âą Les amĂ©ricains se sont donnĂ© la capacitĂ© industrielle dâenrichir lâuranium en U-5 pour leurs rĂ©acteurs, et cela en moins de dix ans aprĂšs la divergence de la premiĂšre pile de Chicago sous la direction de FERMI.
âą Dispositif de production dâĂ©nergie,
âą ProcĂ©dĂ©s de stabilisation dâun dispositif de production dâĂ©nergie,
âą Perfectionnement aux charges explosives.
âą Deux brevets supplĂ©mentaires sont dĂ©posĂ©s dĂ©but 1940, portant sur lâenrichissement de lâuranium U-5 et sur la gĂ©omĂ©trie des «modĂ©rateurs», matĂ©riaux permettant le contrĂŽle des rĂ©actions nuclĂ©aires.
Un dossier sur le "Nuc" passionnant, chaque chapitre est une découverte.
Toujours aussi passionnant, quel travail de recherche et documentation , le résultat est clair, facile a comprendre et trÚs instructif.
ça c'est du doc. Quand Amaz' l'aura fini, il faudra le compiler sur un PDF.
Merci Amazone
Equilibre Est-Ouest
AprĂšs le succĂšs en 1949 de la premiĂšre bombe atomique de lâU.R.S.S., KHROUCHTCHEV, successeur de STALINE Ă partir de 1953, dĂ©cide de changer de tactique. Il propose la mise en place d'une coexistence pacifique. S'il s'agit de gagner du temps pour renforcer son pays, il veut Ă©galement sĂ©duire les pays du tiers-monde en leur donnant une image positive. Leader du bloc de l'Est, l'URSS deviendrait une rĂ©fĂ©rence pour les pays du Sud. Pour rĂ©ussir, KHROUCHTCHEV engage des rĂ©formes (la dĂ©stalinisation) et donne la prioritĂ© Ă des projets prestigieux comme le programme des missiles balistiques, la conquĂȘte de l'espace.
Les Russes se montrent ainsi capables de faire mieux que les Américains.
La « coexistence pacifique » apaise les relations Est-Ouest. Les deux grands trouvent des terrains d'entente et jouent les arbitres dans de nombreux conflits.
La continuité sous la IVÚme République
La continuitĂ© du programme militaire dans lâinstabilitĂ© de la IVĂšme RĂ©publique,
Pourrait-ĂȘtre un oxymore surprenant.
Mais la IVe RĂ©publique Ă©tait quelque peu tempĂ©rĂ©e par le faible renouvellement du personnel politique, quand ce nâĂ©tait pas un jeu de «chaise musicale», dans la continuitĂ© des fonctions sous divers cabinets ministĂ©riels.
On citera notamment :
- Raoul DAUTRY, administrateur général du CEA de 1945 à 1951,
- Félix GAILLARD, chargé de suivre le dossier nucléaire sous trois gouvernements avant de diriger le sien,
- René PLEVEN, ministre de la Défense sous trois gouvernements successifs (de mars 1952 à juin 1954) et président du Conseil à deux reprises,
- Maurice BOURGES- MAUNOURY, secrĂ©taire dâĂtat Ă la prĂ©sidence du Conseil, ministre de lâArmement, ministre de la DĂ©fense Ă plusieurs reprises et prĂ©sident du Conseil.
âą Lâ«Alerte EURATOM» : en juillet 1956, lors du dĂ©bat Ă lâAssemblĂ©e nationale sur lâEURATOM (la CommunautĂ© europĂ©enne de lâĂ©nergie atomique).
âą La crise de Suez (octobre-novembre 1956) va, comme pour DiĂȘn BiĂȘn PhĂ», prĂ©cipiter les dĂ©cisions, en dĂ©montrant une fois de plus les limites de lâalliance.
⹠créer et équiper des centres d'études pour développer les recherches indispensables aux réalisations nucléaires
⹠construire et faire fonctionner des réacteurs capables de produire de l'électricité
âą ne pas perdre de vue les applications militaires.
Merci pour la technicitĂ© et lâimpartialitĂ© de tes articles.
Merci pour cette documentation extrĂȘmement dĂ©taillĂ©e !!
Amazone t'as fait un travail de recherche fouillé, traduit de façon dynamique, bravo
Excellent ! 20/20 !
Merci pour ce poste fort d'Histoire, d'informations, de précisions !
Encore ! J'ai pas fini mon paquet de chips
On découvre comment se fait l'Histoire, c'est innatendu et passionnant !!! Merci et bravo pour cette narration vraiment unique
on attend avec soif un autre Ă©pisode, tu nous as mis l'eau Ă la bouche lĂ
Programme Nucléaire et Force Stratégique
Si la France veut tenir son rang dans le monde, elle se doit dâaccĂ©der au statut de puissance atomique et de sâĂ©quiper de façon autonome, de sa propre «force de frappe». Celle-ci devra, si possible, comprendre les trois composantes Air, Terre et Mer dont ont entrepris de se doter les deux «Grands Pays» USA et URSS.
La Ve RĂ©publique
Charles De GAULLE dernier prĂ©sident du conseil de la IVe RĂ©publique le 1er juin 1958, puis Ă©lu comme premier prĂ©sident de la Ve RĂ©publique le 21 dĂ©cembre de cette mĂȘme annĂ©e, va donner en quelques annĂ©es les impulsions fondamentales. Il bĂ©nĂ©ficie de lâentreprise politique menĂ©e depuis 1954 au sujet du programme atomique et rĂ©alisĂ©e dans lâextrĂȘme discrĂ©tion, par les gouvernements successifs de la IVe RĂ©publique.
Le «retour aux affaires» du GĂ©nĂ©ral DE GAULLE donne une dynamique nouvelle au nuclĂ©aire, auquel il a toujours prĂȘtĂ© une grande attention. Elle coĂŻncide avec le moment oĂč les investissements en Ă©quipements et en recherches commencent Ă porter leurs fruits.
Trois évÚnements importants marquent cette période :
âą la maĂźtrise de l'arme atomique ...
âą la construction de l'usine d'enrichissement d'uranium de PIERRELATTE
⹠le début du programme électronucléaire EDF ; Sans oublier les activités de recherche et développement.
âą L'enveloppe a pour mission de rĂ©sister Ă l'ensemble des charges mĂ©caniques, d'oĂč son appellation de structure,
⹠la tenue aux effets thermiques externes et surtout internes étant dévolue à des protections thermiques adaptées, qui sont déposées ou collées dans les zones exposées.
Toujours aussi passionnant et détaillé.
merci
J'aurais bien aimé avoir des profs d'Histoire comme toi, c'est génial cet exposé
Le choix de lâĂ©nergie nuclĂ©aire et de certaines filiĂšres est le sujet de quelques questionnements.
http://www.mille-sabords.com/forum/index.php?showtopic=58305&hl=
Certaines voix sâĂ©lĂšvent pour dĂ©clarer que si certaines filiĂšres, sâemblant au premier abord trĂšs prometteuses, ont Ă©tĂ© Ă©cartĂ©es câest parce quâelles ne correspondaient pas Ă la volontĂ© militaire ou aux lobbies des industriels.
Donc voici une parenthÚse concernant le sujet principal : « Du Gymnote au Coelacanthe »,
mais qui a du sens et un rapport direct.
Concernant la filiĂšre actuelle Uranium 235 ou Plutonium 239 Dans R.E.P. (ou R.E.B.)
Pour rappel :
Pechblende : minerai dâuranium naturel, composition isotope U-238 = 99,3% et isotope U-235 = 0,7%
U-235 : Fissible par neutron lent (ralenti jusquâau domaine thermique) ===> Fission
U-238 : Non fissible mais fertile, transmutation en Plutonium (Pu-239) par capture neutronique
Pu-239 : Fissible par neutron rapide (directement issus dâune fission sans modĂ©rateur) ===> Fission
Nous devons lâutilisation des RĂ©acteurs Ă Eau PressurisĂ©e (ou eau bouillante) des filiĂšres actuelles U et/ou Pu, aux recherches fondamentales du programme Manhattan ayant abouti aux bombes atomiques.
Les recherches et les applications en laboratoires durant les annĂ©es quarante, ont permis de rĂ©soudre les problĂšmes rencontrĂ©s pour dĂ©velopper lâĂ©nergie nuclĂ©aire.
La dĂ©cennie suivante, grĂące aux moyens mis en jeu dans le domaine militaire, de recherche appliquĂ©e Ă la physique nuclĂ©aire, au contrĂŽle neutronique et la maĂźtrise du cycle du combustible : minerai â enrichissement â production â utilisation - traitement âstockage, ont permis de dĂ©velopper le programme civile.
La mise en application de cette filiĂšre, Ă©tait la suite logique du besoin militaire vers le dĂ©veloppement industriel civile, et non lâinverse. Lâemploi de lâuranium ou plutonium dans les centrales Ă©lectriques seraient mĂȘme un manque pour lâarmement.
Informations FiliĂšre Thorium et sels fondus
RĂ©flexion sur la filiĂšre Thorium
Il nâest pas question de dĂ©nigrer cette filiĂšre, mais de rĂ©tablir la vĂ©ritĂ© sur celle-ci.
LâAsie est riche en gisement de Thorium, mais lâextraction et la conversion pour utiliser cet Ă©lĂ©ment en Ă©nergie nuclĂ©aire est plus difficile et onĂ©reuse que pour lâuranium.
Actuellement, seules la Chine, lâInde et lâIndonĂ©sie travaillent sur les rĂ©acteurs de thorium Ă sels fondus.
LâInde a quelques projets sur le papier, mais aucun ne reçoit beaucoup dâattention. Les scientifiques indiens sâintĂ©ressent davantage Ă un rĂ©acteur avancĂ© Ă eau lourde alimentĂ© par le thorium (Advanced Heavy Water Reactor) tandis le premier ministre indien envisage de conclure des contrats sur des rĂ©acteurs Ă eau lĂ©gĂšre (uranium) en provenance de Russie.
LâexpĂ©rience de NRG & SALIENT permet Ă lâEurope dâĂȘtre en tĂȘte dans la quĂȘte de lâĂ©nergie Ă base de thorium aprĂšs des dĂ©cennies de retard. Un succĂšs Ă Petten pourrait inciter des pays comme lâInde Ă accĂ©lĂ©rer le dĂ©veloppement de leur technologie. Cela peut aussi booster les startups amĂ©ricaines qui ont des idĂ©es intĂ©ressantes, mais qui ont dĂ» mal Ă obtenir des financements.
Quoiquâil en soit, la France nâest plus dans cette logique dâexploitation des gisements et renouvellement, elle peut se permettre de travailler en circuit fermĂ© grĂące au traitement du combustible irradiĂ© qui assure encore pour plus dâun siĂšcle de consommation dâuranium, auquel on rajoutera plus de deux siĂšcles suivant la filiĂšre surgĂ©nĂ©rateur U238 - neutrons rapides â plutonium.
Le programme PhĂ©nix et SuperPhĂ©nix (Caloporteur = Sel de Sodium Fondu) ont dĂ©montrĂ© lâexploitation industrielle de cette filiĂšre, malgrĂ© le manque de prĂ©paration de la part des ingĂ©nieurs chargĂ©s de rĂ©aliser ce projet. La ministre de lâenvironnement du gouvernement JupĂ© puis Jospin, obtint lâarrĂȘt dĂ©finitif de ce rĂ©acteur, ce qui valut dans la rĂ©gion RhĂŽne-Alpes, une virulente controverse. Astrid Projet actuellement menĂ© par les CEA Areva EDF reprendra les bases acquises.
Le mythe sur le réacteur de thorium
Ătant donnĂ© que lâuranium a trĂšs mauvaise rĂ©putation, on a Ă©normĂ©ment de mythes qui circulent sur le rĂ©acteur au thorium.
- 1 - Les rĂ©acteurs de thorium Ă sels fondus ont Ă©tĂ© Ă©cartĂ©s parce quâils ne pouvaient pas faire de bombes nuclĂ©aires
Câest faux. Le rĂ©acteur de thorium peut faire des bombes et ce nâest pas ce qui a motivĂ© son annulation au dĂ©but du dĂ©veloppement des rĂ©acteurs nuclĂ©aires. La conclusion Ă lâĂ©poque est que mĂȘme si le rĂ©acteur de thorium pourrait ĂȘtre moins cher, on ignore ses performances, le bilan neutronique, et la maĂźtrise sur le long terme.
De plus, lâindustrie avait dĂ©jĂ investi Ă©normĂ©ment sur les rĂ©acteurs Ă eau lĂ©gĂšre, Ă trĂšs haute tempĂ©rature et le rĂ©acteur rapide Ă mĂ©tal liquide. Lâindustrie rechignait Ă©galement Ă crĂ©er les services pour le cycle de combustible et la recherche en physique nuclĂ©aire sâĂ©tait beaucoup concentrĂ©e sur les rĂ©acteurs Ă combustible solide. En gros, le monde avait trop investi sur les rĂ©acteurs Ă lâuranium pour tout jeter Ă la poubelle et choisir le thorium.
De plus, il y a une autre hypothĂšse pour laquelle les AmĂ©ricains auraient pu prĂ©fĂ©rer lâuranium et le plutonium elle est dĂ©veloppĂ©e ci-aprĂ©s.
Rappel sur les armes nucléaires
Lâuranium est le seul Ă©lĂ©ment quâon trouve dans la nature quâon peut utiliser comme un explosif nuclĂ©aire. Mais tous les types dâuranium ne peuvent pas faire de bombes. Vous ne pouvez pas utiliser lâuranium naturel ou lâuranium Ă faible enrichissement comme combustible dans les rĂ©acteurs nuclĂ©aires. La raison est quâil contient trop dâUranium 238 qui nâest pas un explosif nuclĂ©aire et trop peu dâuranium 235 qui lui est un explosif nuclĂ©aire.
Lâenrichissement de lâuranium est un long processus pour augmenter la concentration de lâuranium 235 en sĂ©parant lâuranium 238. Le produit final est connu comme lâuranium enrichi qui contient une forte concentration dâU- 235 par rapport Ă celui quâon trouve dans lâuranium naturel.
Lâuranium qui possĂšde une concentration supĂ©rieure Ă 20 % dâU- 235, est Uranium Hautement Enrichi (HEU). LâHEU peut ĂȘtre utilisĂ© comme un explosif nuclĂ©aire si on en dispose suffisamment. Les fabricants dâarmes nuclĂ©aires prĂ©fĂšrent de lâHEU qui est enrichi Ă plus 90 %. Ce type de HEU est connu comme lâuranium de qualitĂ© militaire.
La plupart des rĂ©acteurs nuclĂ©aires commerciaux utilisent de lâUranium faiblement enrichi (LEU) de 5 Ă 9% dâU-235 comme combustible. Le combustible LEU ne peut pas servir dâexplosif nuclĂ©aire, car il contient trop dâU-238.
Concernant le plutonium, il nâexiste pas dans la nature, mais il est crĂ©Ă© dans chaque rĂ©acteur qui utilise de lâuranium naturel ou de lâuranium faiblement enrichi. Certains des atomes de lâuranium 238 vont absorber des neutrons et ces atomes vont se transformer en plutonium (U-238 + n° ===> Pu-239). Le plutonium est un explosif plus puissant que lâuranium de qualitĂ© militaire. Pour obtenir du plutonium, il faut un processus dâextraction chimique qui nĂ©cessite de dissoudre du âcombustible nuclĂ©aire irradiĂ©â hautement radioactif dans de lâacide nitrique bouillant. Câest trĂšs difficile et compliquĂ© dâavoir du plutonium Ă partir dâun rĂ©acteur nuclĂ©aire civil.
Et le thorium, alors ?
Les premiers Ă se pencher sur la question du rĂ©acteur Ă sels fondus furent les AmĂ©ricains du Laboratoire National dâOak Ridge avec Alvin M. Weinberg, directeur du laboratoire pendant le projet Manhattan.
Toutes les pistes furent explorĂ©es pour aboutir Ă la bombe. Le rĂ©acteur Ă sel fondu expĂ©rimental MSRE fonctionna dans un premier temps comme « pile atomique » pour produire de lâuranium de qualitĂ© militaire Ă partir du thorium bombardĂ© par des neutrons.
Le thorium nâest pas fissible,
mais étant fertile il peut donner des éléments fissibles, tout comme U-238 ===> Pu239.
Les transmutations du Th-232 obtenues sont :
Th232 + n° ===> Th233 avec gamma ===> Pa(Protactinium)233 émission béta- ===> U233
U-233, ce fameux Uranium233 fissible, de qualitĂ© militaire comme lâUranium 235.
Et pour des prĂ©sentations Ă©lĂ©gantes on Ă©vite de parler de lâensemble des transmutations du Th.
Mais dans sa globalité :
U-233 obtenu devient U-232 par capture dâun neutron (n°) et en relĂąchant deux n°.
Ou aussi : Th-232 ===> ⊠===> Pa-233 ===> ⊠===> U-232
U232 est fissible aussi mais il est Ă©metteur dâun rayonnement gamma de trĂšs haute Ă©nergie.
Bien sĂ»r, il est nĂ©cessaire en cours de fonctionnement de traiter le caloporteur afin dâextraire lâU-233,
Mais alors la tĂ©lĂ©opĂ©ration avec de lourds boucliers rend la tĂąche trĂšs compliquĂ©. Lâintense rayonnement gamma dĂ©tĂ©riore tout matĂ©riel Ă©lectronique et lâutilisation de robotique inappropriĂ©e.
De ce fait, si lâU-233 est trop contaminĂ© avec de lâuranium 232, alors ce sera difficile dâen faire une bombe. Mais cette contamination peut ĂȘtre Ă©vitĂ©e en sĂ©parant le protactinium 233 en amont, il suffit dâune simple sĂ©paration chimique plus facile Ă obtenir que par la sĂ©paration isotopique comme dans la filiĂšre U/Pu. En sĂ©parant le Pa-233, alors on obtiendra un Uranium 233 quasiment pur.
Donc, câest un mensonge de dire que le rĂ©acteur de thorium ne peut pas faire de bombe nuclĂ©aire, en fait câest mĂȘme le contraire.
Alvin Weinberg, Ă qui on accorde la paternitĂ© du rĂ©acteur thorium et sels fondus, aprĂšs le projet Manhattan subit quelques dĂ©ceptions lors de lâabandon des recherches sur lâavion Ă propulsion nuclĂ©aire, il ne renonça pas Ă porter son projet Ă bout de bras. En plein guerre froide, entre 1965 et 1969, son rĂ©acteur fonctionnait dâabord avec de lâuarium-235 puis avec lâuranium-233 par transmutation du thorium 232 et du plutonium la derniĂšre annĂ©e, prouvant alors la faisabilitĂ© et la viabilitĂ© dâun tel concept.
Il faut se rappeler quâĂ lâĂ©poque des premiers rĂ©acteurs, tous les pays voulaient les bombes nuclĂ©aires. Et donc, si un pays a dĂ©jĂ cette bombe, alors il est de son intĂ©rĂȘt Ă ce que les autres ne puissent pas les fabriquer. Lâavantage de lâuranium 235 et du plutonium est quâils sont trĂšs difficiles Ă fabriquer et donc, la technologie ne serait dans les mains que de quelques pays. Mais si le thorium sâĂ©tait gĂ©nĂ©ralisĂ©, alors tout le monde aurait pu mettre la main sur de lâuranium 233 prĂȘt Ă lâemploi avec un risque plus grand de prolifĂ©ration des armes nuclĂ©aires.
De plus, lâindustrie avait dĂ©jĂ investi Ă©normĂ©ment sur les rĂ©acteurs Ă eau lĂ©gĂšre, et le rĂ©acteur rapide Ă mĂ©tal liquide Ă trĂšs haute tempĂ©rature. Lâindustrie rechignait Ă©galement Ă crĂ©er filiĂšres de traitement diffĂ©rentes pour le cycle de combustible et la recherche en physique nuclĂ©aire sâĂ©tait beaucoup concentrĂ©e sur les rĂ©acteurs Ă combustible solide. En gros, le monde avait trop investi sur les rĂ©acteurs Ă lâuranium pour tout jeter Ă la poubelle et choisir le thorium, car cela ne valait pas le coup. Cela aurait doublĂ© les investissements sans aucune valeur ajoutĂ©e, tout en compliquant la standardisation de fabrication, dâexploitation, et des procĂ©dures de sĂ©curitĂ©.
- 2 - Les rĂ©acteurs de thorium sont surgĂ©nĂ©rateurs et nâont pas besoin dâenrichissement.
Le concept des rĂ©acteurs surgĂ©nĂ©rateurs quâils soient Ă base de thorium ou dâuranium, est quâils vont surgĂ©nĂ©rer au fur et Ă mesure. Ils vont produire de la matiĂšre fissile Ă©gale ou supĂ©rieure par rapport Ă leur consommation de dĂ©part ce qui permet dâavoir une Ă©nergie en abondance sur le long terme.
On peut dire que ce nâest pas un vrai mythe, mais lâabsence dâenrichissement est valable pour tous les types de rĂ©acteur surgĂ©nĂ©rateur. Câest mĂȘme pour ça quâon les a inventĂ©s. Toutefois, le rĂ©acteur de thorium peut utiliser la surgĂ©nĂ©ration thermique. Cela signifie quâon a besoin de beaucoup moins de matĂ©riaux fissiles au dĂ©part par rapport Ă un rĂ©acteur de surgĂ©nĂ©ration rapide. Mais le rĂ©acteur rapide Ă mĂ©tal liquide peut faire la mĂȘme chose avec U-238 ===> Pu239 et donc, ce nâest pas exclusif au thorium.
- 3 - Ils sont indépendant de la filiÚre Uranium
La fission dans ce type de rĂ©acteur va produire plus dâuranium 233 que sa consommation et donc, on a une fission nuclĂ©aire autonome.
Mais les neutrons pour dĂ©clencher la premiĂšre rĂ©action, dâoĂč les sort-on ?
Et bien, câest lĂ que ça se complique un peu. Il est nĂ©cessaire dâavoir de la matiĂšre fissile pour produire des neutrons dans un rĂ©acteur.
Neutrons issus de lâuranium 233 ? Impossible il nâest pas formĂ© en dĂ©but de vieâŠ
De lâuranium 235 ou du plutonium 239⊠Câest un dĂ©tail que les partisans du thorium passent sous silence.
Il faut obligatoirement de lâuranium ou du plutonium dans un rĂ©acteur de thorium, mais Ă©videmment, la quantitĂ© est bien moindre.
- 4 - Il y a plus de Thorium que dâUranium sur Terre
Câest vrai, mais il faut nuancer :
La concentration moyenne de thorium dans la croute terrestre est de 0,00060 % comparĂ©e au 0,00018 % de lâuranium. Mais on a Ă©galement du thorium et de lâuranium dans lâocĂ©an.
Pour un pourcentage en masse, on a
4Ă10-12% de Thorium et 3.3Ă10-7 % dâUranium.
Cela donne 56 000 tonnes de thorium et 4,62 milliards de tonnes dâuranium.
Cependant, lâexploitation de lâuranium en mer coute 4 fois plus cher donc, aujourdâhui non Ă©conomiquement viable. Mais, si comme en France les taxes de lâĂ©lectricitĂ© nuclĂ©aire augmentent afin de subventionner lâĂ©nergie renouvelable dans des limites insupportables, le contribuable pourrait exiger de chercher dans les ocĂ©ans lâUranium devenu alors compĂ©titif. Donc, ce mythe est vrai si on se base uniquement sur la concentration dans la croute terrestre.
Mais on doit prendre en compte la rĂ©partition des gisements. LâInde ne possĂšde aucun gisement dâuranium exploitable, mais elle est assise sur des tonnes de thorium. La Chine possĂšde 50 % de thorium par rapport Ă lâuranium. Donc oui, le rĂ©acteur de thorium est trĂšs intĂ©ressant pour ces pays puisquâils nâont pas besoin de faire dâaller chercher lâuranium Ă lâautre bout du monde en corrompant des gouvernements locaux.
LâEurope nâa que de trĂšs faible gisement Ă part au Groenland. Concernant la France, le pays possĂšde environ 8 500 tonnes de thorium ce qui est Ă©quivalent Ă 190 ans en se basant sur une consommation de 489 Twh au niveau national (moyenne 2010 Ă 2015). Câest vraiment gigantesque, mais encore une fois, cela nĂ©cessitera pas mal dâinvestissement sur lâinfrastructure sans oublier que tout cela se base sur le fait quâon puisse commercialiser le rĂ©acteur Ă sels fondus de thorium. Des Ă©tudes sont menĂ©es par le CEA et CNRS.
De plus, lâextraction du thorium dans les minerais est beaucoup plus coĂ»teuse que celle de lâuranium.
- 5 - Les déchets du réacteur de Thorium ne durent que quelques siÚcles
On entend Ă©galement ce mythe. ComparĂ©s au cycle de dĂ©gradation de lâuranium sur des milliers dâannĂ©es, les dĂ©chets provenant du rĂ©acteur de thorium ne dureraient que quelques siĂšcles. Il est vrai que le rĂ©acteur de thorium ne produit que quelques Ă©lĂ©ments transuraniens. Les Ă©lĂ©ments transuraniens comme le Neptunium, le Plutonium, lâAmĂ©ricium et le Curium sont les plus dangereux nuclĂ©ides dans une pĂ©riode de 10 000 ans. Donc, oui le rĂ©acteur Ă thorium produit moins de dĂ©chets nocifs sur le long terme, mais ce nâest pas le seul. Les rĂ©acteurs Uranium Plutonium Ă neutrons rapides produisent Ă©galement peu dâĂ©lĂ©ments transuraniens.
Attention, Ă ne pas nĂ©gliger lâintĂ©rĂȘt du rĂ©acteur de thorium, mais il nâest pas la solution idĂ©ale qui nous est proposĂ©e par certains acteurs de lâindustrie. Et cette expĂ©rience aux Pays-Bas est assez intĂ©ressante, car elle concerne un rĂ©acteur de prochaine gĂ©nĂ©ration qui est moins nocif et moins gourmand que ce soit sur le combustible ou lâimpact environnemental. Pour certains pays comme la Chine ou lâInde, le thorium pourrait ĂȘtre une vraie alternative, car ils en ont une grande quantitĂ© devant leur porte, mais au niveau mondial, câest plus compliquĂ©.
En conclusion
Est-ce que les rĂ©acteurs au thorium sont lâĂ©nergie du futur ?
Ces derniĂšres annĂ©es, des Startups ont investi sur le thorium et comme toute startup qui se respecte, la communication est plus importante que la rĂ©alitĂ© du terrain. LâĂ©nergie au thorium ne concerne pas seulement le fait dâavoir un rĂ©acteur plus sĂ»r et plus propre. Cela implique aussi de nouveaux projets dâextraction de thorium et nous devons plutĂŽt abandonner lâindustrie de lâextraction puisquâon a dĂ©jĂ lâuranium en trĂšs grande quantitĂ©. LâĂ©nergie idĂ©ale du futur devra ĂȘtre abondante, aussi propre que possible, abordable avec le minimum de dommages collatĂ©raux. Et si on regarde les rĂ©alitĂ©s de lâĂ©nergie au thorium, elle ne rĂ©pond pas Ă nombreux de ces critĂšres.
Nous pourrions mieux utiliser lâĂ©nergie nuclĂ©aire si en fin de cycle, nous valorisons les dĂ©chets issus du retraitement des combustibles irradiĂ©s, comme source de chaleur. Cela permettrait de mieux les contrĂŽler au lieu de les stocker bĂȘtement.
LâĂ©conomie des ressources est de mise, car lâĂ©nergie la plus Ă©cologique qui soit est celle ⊠que nous ne consommons pas !
LâĂ©nergie renouvelable nâest pas la panacĂ©e universelle, contrairement Ă ce que lâon veut nous faire croire.
Soit il sâagit de production dâĂ©nergie intermittente souvent relayĂ©e par du « fossile carbonĂ© », soit par des productions agraires pouvant provoquer un dĂ©sĂ©quilibre alimentaire Ă cause des spĂ©culations, mettant en danger de famine des peuples entiers, si ce nâest encore la crĂ©ation dâimmenses zones arides par extractions des terres rares pour des besoins toujours grandissant de Lithium silicium, afin de stocker de lâĂ©nergie de façon utopique.
Tout cela a un coĂ»t, et la planĂšte ne pourra pas lâencaisser ad vitam aeternam.
Mais rassurez-vous, la Terre non plus nâest pas ad vitam aeternam, et lâhomme encore moins !
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